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Exposition
Cristina RUIZ GUINAZU
MEMORIAS DE PATAGONIA
Peintures
Du 15 janvier au 14 fevrier 2009
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BIOGRAPHIQUE
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Memorias de Patagonia

«· Grands sont les déserts et tout est désert / Grand est la vie, et il ne vaut pas la peine que la vie soit. » Fernando Pessoa.

À l’occasion de son exposition avec Pat Andrea à la Maison Elsa Triolet et Aragon, Cristina Ruiz Guinazu présente un ensemble de peintures récentes et certaines inédites, consacrées aux paysages de Patagonie à partir de ses mémoires d’enfance.

Cristina Ruiz Guinazu, Argentine de naissance et Française d’adoption, trace un parcours d’artiste personnel, écarté des avant-gardes contemporains.

Peintre figuratif, elle développe une thématique issue du quotidien. A l’aide de moyens photographiques, elle recompose des sujets classiques, tels que le portrait individuel ou le groupe, le Paysage et l’objet. Ses modèles, entre d’autres, sont souvent empruntés de son environnement proche, de la famille et des autoprésentations.

Cristina Ruiz Guinazu puise ses inspirations de l’art classique, de la Renaissance, de l’esthétique Aristotélicienne mais également des artistes pompiers comme elle le revendique dans le journal de l’art contemporain du Mont de Marsan en 2008, à l’occasion de l’exposition du groupe· « Figuration de l’imaginaire » à laquelle elle participait.

S’il faut rapprocher les peintures de Cristina Ruiz Guinazu à un courant artistique, c’est vers les Réalistes Italiens et Américains que l’on pourrait se tourner. On retrouve chez elle la même mélancolie diffuse qui pénètre tous les· moments de la vie. Son réalisme s’exprime de façon troublante et irréelle, voire énigmatique.

La nostalgie de son pays la pousse à s’approprier les paysages de la Patagonie. Elle réalise des espaces réels ou imaginés d’une grande émotion : véritables mises en scène théâtrales, où la mémoire du passé se confond avec le présent dans des compositions chimériques.
Sensation du tragique moderne qui rappelle Benjamin à propos de la caractéristique de l’héroïne de Baudelaire : Vivre au cœur de l’irréalité (de l’illusion).

Des paysages vastes, déserts et étendus à l’infini sont interrompus par la solitude translatée de personnages figés et d’objet. Espaces vides, transformés uniquement en apparence, puisqu’ils nous renvoient toujours le même vide – sentiment éternel d’errance ou d’un road movie.

Dans un étrange métissage avec de cultures autochtones et translatées, Cristina Ruiz Guinazu juxtapose des objets sans aucune relation entre eux. Éléments dépaysés dans la perspective attendue du paysage ils sont confrontés avec des formes et des situations modernes.


Des jeunes enfants, filles et garçons, parfois des adultes, nus ou légèrement habillés, solitaires ou en jumeaux, vus de dos ou de face, parés d’attributs symboliques, isolés et immobiles, parfois dans un décor de ruines indiennes, escortés de dinosaures reconstitués ou en fossiles, de condors, renards et· lièvres de Patagonie, nous plongent dans l’univers de l’intemporalité.

La réification de l’existence de ses personnages nous créé un sentiment de mystère et d’étrangeté.

Leurs attitudes, même si elles possèdent des caractéristiques reconnaissables, ne sont pas naturelles. Les expressions sont raides, mécaniques, avec des poses improbables – des enfants peints en enfant ayant des expressions d’adultes.
S. Freud justifie clairement ce phénomène de l’inquiétante étrangeté : «· L’auteur peut se créer un monde (…) qui s’écarte du monde réel par le fait qu’il admet des êtres surnaturels. »
Sentiment exprimé par lui-même à propos de Gradiva de Jensen : « une défiguration par déplacement ».

Tous ces paysages de lumière, diurne ou nocturne, d’ocre rouge, jaune, sableuse, gris vert, de ciels bleus, de steppes immenses ou de roches géologiques sont modelés d’une grande plasticité et d’une parfaite maîtrise technique.

Cette solitude répandue est propre au caractère libre de Cristina Ruiz Guinazu comme peuvent l’être le calme, le silence, l’apathie et la mélancolie. Ici on peut se référer à Schopenhauer lorsqu’il disait : « Qui n’aime pas la solitude, n’aime pas la liberté car on est libre qu’en étant seul. »

Ses créations ne sont que la nostalgie du paradis de son enfance perdue, engloutie et régurgitée comme un fantôme de la profondeur de sa Mnémosyne.· Projection des dessins du monde secret et contemplation des histoires fabriquées par le royaume imaginaire sur un monde réel.

Juillet 2009

Popy Arvani